Le SOARMASTER ou le maître des ascendances

par Philippe Bataille


 

Après le V Expérience, GRAUPNER sort un planeur encore plus performant et tout particulièrement destiné à la compétition F3J, c'est à dire au vol de durée avec un départ au treuil à main.

 

Pour être absolument sûr de ne pas rater l'objectif qui était de fournir un kit de planeur de plaine capable de rivaliser avec les tout-plastique du genre Esprit, Stork ou Termik, GRAUPNER a demandé à Elmut Quabec de définir le concept aérodynamique de ce nouveau planeur et notamment le profil (HQ/W/3.8 vers 3.10).

 

Elmut n'est pas un inconnu dans le domaine du modélisme puisqu'il a consacré une bonne partie de sa vie à étudier l'aérodynamique adaptée à notre domaine de vol. Par ailleurs il connaît la compétition et on le voit souvent dans les rencontres de planeurs F3B. Il a dessiné le MASTERPIECE, planeur de F3B, qui est le détenteur actuel du record du monde de l'épreuve de vitesse avec 14 secondes. Helmut a aussi publié un livre sur ses profils (malheureusement toujours en allemand).

 

Le planeur qu'il a conçu répond aux critères exigés par le F3J c'est à dire capable d'être treuillé à la main, avoir un taux de chute très faible pour s'approcher des 10 minutes, pouvoir transiter c'est à dire s'échapper des zones ou la portance est mauvaise et enfin permettre de faire des approches de précision. L'ensemble de ces critères a donné naissance au SOARMASTER, planeur qui a un look d'enfer mais qui a surtout un profil parfaitement adapté : le HQ/W/3.9.

 

Le kit

 

La boite est forcément imposante puisque le fuselage fait environ 1m60 de long. A l'intérieur, on trouve le dit fuselage et la coiffe tous deux en époxy gel coaté blanc, la partie centrale de l'aile et les deux extrémités en polystyrène expansé blanc coffré samba, les deux winglets moulés (en carbone !), le plan et les sachets d'accastillage. Le kit est fabriqué en Slovénie.

 

Je ne vais pas vous reproduire la notice de construction qui est très bien faite et de plus en français mais simplement vous décrire le processus que j'ai suivi. Avec mon ami Jacques qui m'a aidé pour l'entoilage, nous avons mis un peu moins de 5 jours pour être prêts à voler.

 

Dans l'ordre de la construction, j'ai commencé par faire l'aile (sauf la fixation de la prise 9 broches), le stab et le fuselage.

 

L'aile

 

L'aile est donc en 3 parties avec une partie centrale fixée sur le fuselage et deux extrémités qui se raccordent avec une clef en carbone de 10 mm de diamètre.

Avant toute chose, placer l'aile sur le fuselage en vérifiant les alignements et la symétrie, marquer les trous avec un crayon très affûté (après, vous aurez la prise de connexion qui gênera).

Graupner a innové en plaçant la charnière (ruban de tissus du genre bande d'arrachage) dès la construction de l'aile sous le coffrage. Une saignée à l'intrados assure le débattement. Evidemment, il reste un peu de travail pour finir ce que la machine outil n'a pas pu faire. Dessiner l'emplacement de la charnière à l'extrados et entamer le bois avec le dos d'une lame de scie à métaux qui a la bonne largeur pour permettre un débattement vers le haut. A l'intrados, il faut couper le balsa sur la largeur et sur toute la longueur en faisant attention à ne jamais entamer la charnière. La saignée fait 4 mm de largeur ce qui doit correspondre à la fraise utilisée à la fabrication. Cette côte est bonne pour les ailerons mais je l'ai portée à 8 mm pour les volets afin d'obtenir plus de débattement vers le bas en fonction aérofreins. Après ce petit travail, on peut passer directement à l'entoilage car il n'est absolument pas nécessaire de poncer les ailes (sauf de les dépoussiérer bien sûr).

Pour l'entoilage, j'ai utilisé la même technique que pour le V Expérience qui consiste à appeler Jacques. Cette technique a l'avantage d'être assez rapide mais l'inconvénient de supporter les histoires d'un Gersois bougon. Deux mots quand même sur la technique d'entoilage utilisée par Jacques qui a entretenu amoureusement les avions de la compagnie Air Inter pendant plus de 30 ans. Jacques utilise la technique du papier cul (je vous l'avais dit, il est du Gers) dont voici les principales étapes :

- placer le film à plat sur la surface à entoiler.

- coller avec le fer la périphérie sur 5 mm.

- faire tous les collages de chant.

- avec un décapeur à la bonne température commencer à tendre le film thermo rétractable en appuyant avec le rouleau de papier cul (qui doit être neuf, blanc et absent de tout motif en relief).

Pour le SOARMASTER , on a utilisé le film GRAUPNER et le résultat est absolument remarquable à tel point que plusieurs modélistes ont vraiment cru à un tout plastique.

Le panneau central et les deux extrémités faisaient ensemble un poids total de 1130 g et après entoilage 1290 g.

Les logements pour les servos sont déjà préparés et il reste à trouver les servos qui vont bien.

J'ai utilisé des Hitec 225 BB pour les volets en raison de leur couple (3.9 kg) et de leur épaisseur (16.8 mm). Pour les ailerons, j'ai utilisé des Hitec 85 BB en raison en premier de l'épaisseur (13 mm), de leur couple et de leur prix.

Pour l'installation des 4 servos, j'ai procédé dans l'ordre suivant :

- agrandir le logement prévu au milieu de la partie centrale pour loger une prise 9 broches.

- passer les fils dans la partie centrale. Il faut des fils pour les servos de volet et pour les rallonges d'ailerons. J'ai utilisé du fil en nappe (c'est plus facile à passer dans les saignées du polystyrène).

- préparer une prise mâle 9 broches (DB9) et souder les fils sur la prise en respectant un schéma (même chose que pour l'Expérience).

- tirer sur les fils pour que la prise affleure le coffrage de l'aile (ne pas fixer la prise pour l'instant).

- souder les fils au servo de volet.

- souder une prise femelle de type servo pour raccorder les ailerons.

- Souder une prise mâle sur du fil en nappe et le passer dans les extrémités.

- souder ce fil aux servos d'ailerons

A ce stade, vous devez faire le neutre des servos et fixer les palonniers avant de les coller des les logements (collage à l'époxy 5 minutes en prenant le soin de protéger les servos avec du scotch ou de la gaine thermo). Il ne reste plus qu'à coller les inserts en alu sur les parties mobiles.

 

Le stabilisateur

 

Le stab est livré en 2 parties à assembler avec 2 clefs en carbone. Avant de faire le collage définitif, il faut faire le logement pour la pièce en bois dur qui recevra la vis de fixation. GRAUPNER fournit du tissus de verre pour renforcer la partie centrale du stab. Compte tenu de la taille des clefs en carbone, il n'est pas nécessaire d'effectuer ce renfort si vous soignez le collage des pièces (utiliser de préférence de l'époxy à séchage lent et en chargeant celle-ci avec du micro ballon). Une fois l'assemblage sec, vous pouvez tracer l'emplacement du trou de fixation du stab et coller l'écrou dans le fuselage.

Les volets mobiles seront à travailler de la même façon que les volets et les ailerons. Une corde à piano de 2 mm de diamètre sera pliée pour actionner les volets – ATTENTION à ce collage qui est très important et croyez-en mon expérience (malheureuse) – Le balsa utilisé dans le stab est léger et un peu tendre, il faudra donc faire un collage particulièrement soigné de la pièce métallique sur le balsa que vous aurez durci au préalable avec de la cyano très fluide. L'entre axe entre les 2 cap qui rentre dans les chappes à boule est de 12 mm, il faudra couper ces cap en faisant attention qu'elles ne puissent pas se dégager des chappes même dans les débattements max.

Pour l'entoilage, même méthode que pour les ailes, c'est-à-dire celle de Jacques.

 

Le fuselage

 

Ce fuselage est une pièce magnifique. Le moulage est d'une très grande qualité et le plan de joint quasiment invisible. Dans un premiers temps, il faut faire les trous pour les fixations de l'aile et le passage de la prise 9 broches. A l'aide du support en CTP destiné à recevoir les écrous de fixation, vous pouvez dessiner l'emplacement de la prise 9 broches. Câbler la prise 9 broches avec la longueur de fils nécessaire pour atteindre le récepteur, si vous volez avec des récepteurs Multiplex , c'est le moment de mettre les ferrites dans le câblage. Coller les écrous et fixer la prise 9 broches avant de coller ce support dans le fuselage. Pour le collage, c'est très simple, il suffit de coller une baguette de balsa avec un point cyano sous le support et de l'enfiler dans le fuselage, dès que vous apercevez la fixation arrière, vous commencer à mettre une vis (qui a été cirée auparavant) puis même chose pour celle de devant et vous fixer avec une pince votre baguette sur le haut du fuselage ce qui permettra d'épouser le galbe du fuselage (quand la colle époxy sera sèche, il suffira de casser la baguette de balsa).

La deuxième étape consiste à coller le support de crochet de treuillage. GRAUPNER fournit enfin un vrai crochet de treuillage Son emplacement est directement lié à la position du centre de gravité, la position du CG et du crochet indiquée sur le plan doit conduire à des trajectoires de montée très droites.

La troisième étape consiste à coller la platine servo dans le fuselage et c'est le moment de choisir les servos (les Hitec 225 que j'ai utilisé pour les volets vont parfaitement). L'emplacement de la platine est porté sur le plan et c'est celui qu'il faut respecter si vous voulez utiliser une batterie de 1000 mAh et plus tard installer des soutes à ballast. J'ai renforcé le collage de la platine en mettant des mèches de carbone (attention de placer les gaines de commande du stab au-dessus de la platine au moment du collage).

 

Voilà, c'est fini! Il ne vous reste plus qu'à mettre un récepteur avec son antenne scotchée sur un baguette que vous enfilerez dans le fuselage et une batterie (4 éléments et 1000 mAh). Quand vous posez l'aile sur celui-ci les servos sont directement connectés et vous n'avez plus qu'à faire les commandes de vol (attention, il faut utiliser les chappes livrées dans le kit et ajuster les trous de fixation des pitons en alu parfaitement au diamètre pour éviter d'avoir du jeu et de couder l'autre extrémité).

 

Centrage

 

Une fois le planeur assemblé et posé en équilibre sur le CG indiqué sur le plan, il a fallu se rendre à l'évidence et mettre du plomb dans le nez. Comme d'habitude, je mets du plomb de pêche dans un sachet en plastique scotché sur le côté avant du fuselage, une fois l'équilibre obtenu, je mets le sachet dans le nez du planeur (et je peux à tout moment modifier le lest). Le poids de ce lest est de 180 g ce qui fait un poids total du planeur prêt à voler de 2480 g soit 80 g de plus que prévu.

 

Réglages

 

J'ai respecté les réglages préconisés par GRAUPNER excepté pour la fonction aérofreins sur les volets (j'ai mis 30 mm vers le bas).:

 

 

Profondeur

10 mm

Direction

12 mm

Ailerons

20 mm vers le haut
10 mm vers le bas
en aérofreins 10 mm vers le haut

Volets

treuillage 5 mm vers le bas
aérofreins 30 mm vers le bas
transition 2 mm vers le haut

Compensation de la profondeur quand les aérofreins sortent

2 mm vers le bas

 

Les vols

 

Nous avions rendez-vous avec Roger à 10h30 un dimanche matin (avant il dort!) du mois de mai (en fait le seul dimanche où il n'y avait pas de concours). Le montage du SOARMASTER s'effectue en quelques minutes. Il suffit de placer l'aile sur le fuselage, de visser les 2 vis de fixation, de placer les clefs en carbone pour les extrémités d'ailes, un peu de scotch et c'est fini.

Toutes les gouvernes étant au neutre, j'ai fait un lancé main pour vérifier si le planeur n'avait pas besoin de correction.

Tout de suite, nous avons déroulé un treuil de type F3J, c'est à dire 150 mètres de fil de nylon de 1.2 mm de diamètre. C'est Boris qui a treuillé en utilisant un point fixe et un renvoi. La montée s'effectue sans correction à la profondeur, il faut simplement tenir l'axe à la dérive, les réglages pour la valeur des volets semblent corrects (5 mm) même si la tension n'était pas forte dans le câble.

Les 2 premiers vols ont permis de constater la bonne homogénéité des gouvernes et la bonne position du CG. Ce planeur est un régal en spirale. Sans doute grâce à ses winglets, il est très stable sans tendance à engager ou à sortir du virage. Il n'est pas nécessaire de contrer constamment aux ailerons et seul l'ordre à la dérive le maintient dans la spirale.

J'ai essayé la transition avec ou sans volets braqués vers le haut. Sans volets, le planeur est stable sur la trajectoire et le taux de chute est minime. Avec les volets légèrement vers le haut (2 mm), le planeur accélère plus franchement et la vitesse est plus importante mais le taux de chute s'accroit et, dans ce cas, il faut être sûr de trouver une zone d'ascendance.

Par rapport au Selig 7037, le profil d'Helmut Quabeck permet au SOARMASTER d'exploiter un domaine de vol beaucoup plus large (notamment sur la restitution).

La correction à la profondeur de 2 mm vers le bas quand les aérofreins sortent est une bonne valeur à une vitesse d'approche normale. Si vous arrivez vite, cette correction ne sera pas assez forte et le planeur aura tendance à vouloir mettre le nez en l'air. L'approche avec les aérofreins est un régal et l'efficacité des gouvernes est conservée, ce qui permet d'arriver avec un plan très fort et de doser progressivement son point d'atterrissage (et j'ai pas dit d'impact).

4 jours plus tard, j'ai utilisé le SOARMASTER au concours de F3J organisé par le club des Cigognes. Ce concours compté pour la sélection de l'équipe de France pour le prochain championnat du monde qui doit se dérouler du 8 au 15 août en Angleterre. Malgré le peu de vols effectués auparavant, le SOARMASTER s'est montré très docile et parfaitement adapté à cette catégorie en rivalisant pendant les 2 premières manches avec les planeurs tout plastique. Le premier treuillé a été effectué avec un seul treuilleur alors que le deuxième a été effectué avec 2 coureurs donnant une altitude plus importante en sortie de treuil. Seul un incident sur la commande de profondeur m'a empêché de finir le concours (voir encadré).

 

Conclusion

 

GRAUPNER n'a pas failli à sa tradition en offrant un kit de très bonne qualité. En s'appuyant sur un spécialiste comme Helmut Quabeck, GRAUPNER a sorti un planeur de compétition dont les performances en combleront plus d'un. Enfin, ce planeur occupera une place importante dans un marché où seuls les planeurs à plus de 5000 FF semblaient être le passage obligé pour pratiquer la compétition.


Un incident est survenu au 3ième vol du concours de Brétigny. Pendant le treuillage, j'ai perdu le contrôle de la profondeur, ce qui a entraîné le crash du modèle. Plusieurs personnes ont vu le volet gauche de profondeur flutter violemment. Après avoir examiner cette pièce, il semble qu'il faille porter une attention tout à fait particulière à ce montage (voir le texte). La rigidité du papillon ne semble pas en cause mais plutôt la qualité du balsa (trop tendre) sur lequel est collée la manivelle de commande (cap de 2 mm). J'ai adressé une note à Graupner qui prendra certainement des mesures pour corriger ce problème.

 

 

 

CARACTERISTIQUES TECHNNIQUES

 

Envergure

3400 mm

Longueur

1560 mm

Profil de l'aile

HQ/W/3.9 vers 3.10

Profil du stab

HQ/W/0.8 vers 0.9

Surface de l'aile

68 dm˛

Surface du stab

7 dm˛

Poids total (sans ballast)

2480 g

Charge alaire

36,4 g/dm˛

 



 
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