Le
centrage c’est presque simple !
Thierry Platon 21/09/2006 |
Rappels
d’aérodynamique
-
une
force de portance Pa = 1/2.r.S.V².
perpendiculaire
à la vitesse air et appliquée en un point F appelé foyer du profil.
r : masse volumique de
l’air
S :
surface
V
vitesse air
Lorsqu’on
est loin du décrochage (c’est à dire pour des incidences pas trop élevées),
le coefficient de portance dépend de l'incidence a du profil selon une loi linéaire :
Cza(a) =(a- a0) avec
=
(cas d’une aile avec répartition elliptique
de portance)
En
première approximation est une constante indépendante du profil ,
est
l’allongement de l’aile,
a0 est l'angle d'incidence à portance nulle du profil.
-
une force de traînée T= 1/2.r.S.V².Cx opposée à la vitesse air
Cx :
coefficient de traînée
-
un
moment de rotation M = 1/2.r.C.S.V².Cm qui a tendance à faire pivoter le profil.
Cm : coefficient de moment,
C : corde du profil
Le
coefficient de moment Cm est intimement lié à la courbure du profil. Il est nul
pour les profils symétriques, négatif (c'est-à-dire piqueur) pour les profils
classiques, positif (c'est-à-dire cabreur) pour les
profils autostables (ailes volantes).
Selon
la théorie des profils minces, lorsque
le foyer F est positionné à 25% de la corde, le coefficient de moment Cm devient
indépendant de l'incidence.
On a alors Cm = cte = Cm0, moment à incidence nulle
Centre
de poussée du profil
En prenant le bord d’attaque comme référence, le moment
total auquel est soumis le profil est la somme du moment du à la portance
et du moment M:
Mtotal = 0,25.C.P – M = 1/2.r.S.V².C.(0,25Cz – Cm) = 1/2.r.S.V².Cz (0.25 – Cm/Cz)
Mtotal = P (0.25 - Cm/Cz).C
L'effet
combiné de
Foyer du profil
Il
est fondamental de bien distinguer le rôle du centre de poussée CP de celui du
foyer aérodynamique F. Une manière simple de se représenter les choses est la suivante : pour un profil soumis à un
écoulement d'incidence a :
-
Le CP est le point où s'applique l'ensemble des efforts aérodynamiques auquel
est soumis le profil, c'est-à-dire la combinaison de la portance Cz et du
moment Cm
-
Le foyer F est le point où s'applique les seules variations de portance DCz lorsque à partir de l'incidence a le profil subit une variation d'incidence
Da.
Contrairement au centre de poussée, la
position du foyer F est fixe et indépendante du Cz et de l’incidence. Le foyer est
situé à 25% de la corde moyenne en partant du bord d'attaque.
Xf = 0.25 = constante
Il
faut cependant préciser que la théorie linéaire des profils minces n’est qu’une
approximation. Dans "la vraie vie" Cza et Cm ne sont pas des constantes
parfaites mais peuvent varier légèrement
avec l'incidence (des logiciels élaborés comme Xfoil/Profili
montrent que les courbes Cz= f(α) ne sont pas
toujours des droites). En cas de variation du Cm entre deux Cz de vol différents, la position du foyer correspondant dépend
de la pente de la courbe Cm = f(Cz) :
Xf = 0.25-DCm/DCz
Foyer
du planeur
Pour
un planeur complet la définition du foyer aérodynamique est identique:
Le foyer du planeur est le point où
s'applique la variation de portance auquel sera soumis le planeur lorsque
celui-ci subit une variation d'incidence.
Il
est important de noter que l'incrément de portance dont il est question ici est
bien la somme de l’incrément de portance de l'aile et de celui du stab. Le
foyer du planeur complet est donc situé au barycentre de ces 2 incréments.
Etude de l’équilibre du planeur
Lorsque le planeur est en vol rectiligne
uniforme, les forces auxquelles il est soumis s’équilibrent. La somme des forces de portance de l’aile et du stab
est équivalente à une force unique appliquée au centre de poussée global du
planeur CPglobal.
Cette force compense le poids du planeur.
Pa + Ps = mg
Pour que le planeur soit à l’équilibre il faut
que le centre de poussée global CPglobal et le centre de gravité du
planeur coïncident. Le moment de la
portance de l’aile par rapport au centre de gravité (produit de la portance de
l’aile par le bras de levier entre CPaile et CG,) est
alors équilibré par le moment lié à la portance du stab (produit de la portance
du stab par le bras de levier entre CG
et le foyer du stab -- on suppose ici un stab symétrique--). Ceci s’écrit :
Pa.(Xcg-Xcp).C
= Ps.(L+(0.25-Xcg)C)
Avec Pa :
portance de l’aile
Ps : portance du stab on a aussi XCPglobal = Xcg
C : corde
aérodynamique moyenne de l’aile
Xcg : position relative du centre de gravité
XCPaile
: position relative du centre de poussée de l’aile, XCPaile = 0.25 – Cm/Cza
Soit :
On a par ailleurs :
Pa= ½.ρ.V²Sa.Cza
et Pstab
=
½.ρ.V²Ss.Czs
On peut donc écrire :
Sa.Cza.(Xcg -
(0.25 – Cm/ Cza).C
= Ss.Czs.(L+(0.25-Xcg)C)
Sa.Cza.(Xcg -
(0.25 – Cm/ Cza)
= Ss.Czs.(L/C+(0.25-Xcg)
C'est-à-dire (1) :
XCG.(Sa.Cza+ Ss.Czs = (0.25+L/C).Ss.Czs + 0.25.Sa.Cza - Cm.Sa
Comme à l’équilibre Xcg = Xcpglobal,
On peut aussi écrire :
XCPglobal.(Sa.Cza+ Ss.Czs) = (0.25+L/C).Ss.Czs + 0.25.Sa.Cza - Cm.Sa
Cette formule plus générale
est également valable hors équilibre. Elle exprime le fait que le moment de
l’ensemble des efforts aérodynamiques (par rapport à un point de référence
situé au bord d’attaque) est égal à la somme :
- du moment associé à la
portance du stab appliqué au foyer du stab : (0.25+L/C).Ss.Czs
- du moment associé à la
portance de l’aile appliqué au foyer de l’aile : 0.25.Sa.Cza
- d’un moment constant lié au
Cm de la voilure : - Cm. Sa
Notion
de stabilité
-
un système est dit en équilibre stable s'il a tendance à revenir de lui-même à
sa position initiale lorsqu'on l'en écarte. C'est le cas d'une bille au fond
d'une surface concave (un bol).
-
un système est dit en équilibre instable si, après l'avoir légèrement écarté de
sa position initiale, il a de lui-même tendance à s'en éloigner encore plus.
C'est le cas de la bille posée au sommet d'une surface convexe (un ballon).
-
un système est dit en équilibre neutre si, lorsqu'on l'écarte de sa position
initiale, il reste alors dans la nouvelle position où on l'a mis. C'est le cas
d'une bille posé sur un plan horizontal. Toutes les positions du plan sont
alors des positions d'équilibre.
Considérons
un planeur subissant une perturbation quelconque (à coup sur le manche,
turbulence, mise en piqué …). Cette perturbation génère une variation
d'incidence et donc une variation de
portance DCz appliqué au foyer du
planeur Fp.
Le comportement du planeur après perturbation va
dépendre de la position du foyer Fp par rapport au centre de gravité du planeur CG
- soit CG est situé en avant de Fp et le planeur est
alors soumis à un moment de tangage qui va le faire revenir vers sa position
d'équilibre initiale. Le planeur remonte dans le test du piqué, on dit qu’il
est « centré avant ». Il est stable.
- soit CG est situé en arrière du
foyer Fp et le
planeur est soumis à un moment qui va l'écarter encore plus de sa position
initiale. Dans le test du piqué le planeur accentue son piqué initial, il est
instable. Il est dit « centré arrière ».
- soit CG et Fp coïncident. Après la perturbation le
planeur reste équilibré, il conserve donc sa nouvelle attitude de vol (pas de
moment de tangage) ainsi que sa nouvelle incidence. Dans le test du piqué il
conserve sa pente de descente, le planeur est dit « neutre »
On notera que, contrairement à la notion
d’équilibre, la notion de stabilité ne fait pas intervenir la position du CP de
l'aile mais uniquement celle foyer aérodynamique
du planeur.
Le foyer est parfois appelé "limite de
centrage arrière", je trouve cependant
cette appellation assez ambiguë :
- le terme "limite" laisse penser qu'il va
se passer quelque chose de vraiment catastrophique si on franchit cette
"limite"et que le planeur sera totalement incontrôlable. Ceci n’est
pas toujours vrai.
-
le terme «limite de centrage arrière» laisse
entendre que l’on est déjà centré arrière bien avant d'atteindre cette « limite »
qu'il ne faut surtout pas dépasser!
Il
faut dire que le terme « foyer du planeur » n'est pas non plus très
explicite, l’appellation « point neutre » ou « point de stabilité neutre »
serait plus appropriée.
Le centrage « neutre »
au foyer du planeur est souvent recherché en voltige ou en vol de pente. Il
permet de «poser» le planeur sur une trajectoire qu'il conservera tant qu'aucun
ordre ne sera donné. Par contre sur les planeurs de gratte ou de vol à voile,
avec lesquels on vole plus haut et plus loin, on adoptera plus volontiers
un centrage plus avant. Le planeur sera ainsi stable, revenant de lui-même
vers son point de vol après une perturbation. Ce point de vol pourra de plus
être optimisé pour que le planeur présente par exemple une finesse maximale
ou une vitesse de chute minimale
Calcul
simplifié du foyer du planeur
- L’incrément de portance de
l’aile est :
DPa = 1/2.r.Sa.V².DCza
( Sa surface de l’aile)
avec DCza = et
=
(
est l’allongement de l’aile)
Cet incrément de portance
s’applique au foyer de l’aile, soit 25% de la corde aérodynamique moyenne de
l’aile
On néglige dans un premier temps l’interaction
du sillage de l’aile avec le stab. Celui-ci est donc soumis à la même variation
d’incidence que l’aile, la variation de portance du stab est donc :
DPs = 1/2.r.Ss.V².DCzs (Ss surface du stab)
avec DCzs = et
=
(
est l’allongement du stab)
Cet
incrément s’applique au foyer aérodynamique du stab.
- Le foyer global du planeur
se situe au barycentre de ces 2 incréments (c'est-à-dire le point d’équilibre
de ces 2 forces). Sa distance relative par rapport au bord d’attaque de l’aile
est donc définie par la relation :
DPa.(Xf –
0.25).C = DPs.(L – (Xf – 0.25).C) (1)
D’où Xf = soit Xf =
De cette formule générale on
peut déduire quelques formules simplifiées connues par ailleurs :
- en négligeant la surface de stab au dénominateur
on obtient Xf =
Soit en faisant apparaître le volume de stab : Xf ≈
- en admettant que on a alors
Xf ≈
Si dans cette formule on
néglige la surface de stab au dénominateur on obtient :
Xf ≈
Cette formule figure (avec
une erreur de signe au numérateur) dans
l’article sur la méthode SPP sur le site épervier sud Luberon.
On voit ainsi que la position
du foyer dépend principalement du volume de stab et des allongements respectifs
de l’aile et du stab. Du fait des approximations faites ci-dessus les
caractéristiques du profil n’interviennent plus dans cette formule.
Prise en compte du sillage de l’aile
Dans les calculs précédents nous n’avons pas pris en
compte l’influence du sillage de l’aile, or celle-ci n’est pas négligeable.
La
portance de l’aile génère un effet de sillage qui dévie l’écoulement vers le
bas. Un stab calé à zéro sera ainsi soumis à un flux dévié vers le bas et sera
en fait légèrement déporteur. Cet effet doit être pris en compte lorsqu’on
calcule le calage du stab et la position du foyer.
La déflexion de sillage « e » est
proportionnelle au Cz l’aile et dépend de la position du stab par rapport à
l’aile. La théorie de la ligne portante donne
une valeur de cette déflexion :
e = =
k est ici un
coefficient empirique qui permet de tenir compte de la position relative du
stab par rapport à l’aile. Les valeurs admises sont les suivantes : k≈ 0.5 pour
un stab en T , k≈1 pour un stab situé au même niveau que l’aile. A mon avis
ces valeurs demandent à être consolidées de manière expérimentale.
L’incidence vrai au niveau du
stab est donc αstab= α – e
Et l’incrément de portance du
stab correspondant à une perturbation Da est :
DPs = 1/2.r.Ss.V².DCzs = 1/2.r.Ss.V².As (Da -De) = 1/2.r.Ss.V².(1-).As Da
Dans le calcul de cet
incrément de portance tout se passe donc comme si le coefficient de portance du
stab As était multiplié par
1- = 1 -
.
La position du foyer est donc
définie par :
Xf = avec ε
=
Cette formule est analogue à
celle proposée par Jean Couzinet et citée par Serge
Barth dans Looping n°59. Le coefficient
K utilisé par Jean Couzinet a
donc pour valeur K =
En
négligeant la surface de stab au dénominateur on obtient une formule simplifiée:
Xf = ,
Soit en introduisant le volume de stab Xf ≈
avec =
Cette formule figure dans
l’article sur le centrage sur le site de Matthieu Scherrer
Prise en compte des variations de Cm
Nous avons vu
qu’en cas de variation du coefficient de moment Cm, la position du foyer du
profil est
Xfprofil = 0.25 -
L’équation (1) devient
alors :
DPa.(Xf – (0.25-).C = DPs.(L – (Xf – 0.25).C)
On en déduit la position du
foyer global du planeur :
Xf = -
D’où la formule suivante
prenant en compte la variation de Cm :
Xf = -
Avec =
=
ε =
Cette formule permet notamment
de prendre en compte l’influence du
profil et des variations de et de Cm sur la stabilité
du planeur en fonction du régime de vol
Prise
en compte de la portance du fuselage
Même en ne faisant aucune approximation
et en tenant compte des corrections liées au sillage de l’aile et aux variations
de Czα et de Cm, la position du foyer donnée par les calculs
ci-dessus est en général sensiblement plus reculée que celle que l’on peut
mesurée après avoir parfaitement réglé son planeur pour avoir un comportement
neutre. Nous avons supposé que cet écart pouvait être lié à la portance du
fuselage. Voici donc une approche qui permet de prendre en compte une correction
de fuselage.
Soit Lf, la longueur du fuselage, Sf sa surface projetée dans le plan horizontal, et Xav la longueur relative de l’avant du fuselage (rapport entre la distance nez - BA emplanture et la longueur du fuseau). On admet que la portance du fuselage est proportionnelle à Sf ainsi qu’à un coefficient de portance Af. On suppose également que le foyer du fuselage se situe à une distance relative Xfus du nez du planeur.
En introduisant l’incrément
de portance fuselage ΔPf,
l’équation (1) devient :
DPa.(Xf –
0.25).C + ΔPf.(0.25+(Xav – Xfus).Lfus + Xf.C) = DPs.(L – (Xf – 0.25).C)
Avec ΔPf =
Sf. Af. Da
On en déduit la position du
foyer Xf
Xf =
Soit la formule générale
suivante :
Xf = 0.25 +
Avec =
=
ε =
Il n’existe pas de formule
pour calculer les paramètres Xfus (position relative du foyer fuselage) et Af (coefficient de portance du fuselage). Nous proposons
donc une approche purement empirique en définissant un jeu de valeur (Xfus, Af) à partir de la
mesure du centre de gravité sur des modèles réels.
Xfus ≈ 0.2 et Af ≈ 0.08 (l’incidence
alpha étant exprimé en degré)
( ces valeurs restent à optimiser et à valider )
Feuille de calcul Excel
Une feuille de calcul Excel
a été développée pour faciliter la mise en œuvre de ces formules. Ce fichier
Excel permet les calculs de centrage pour des planeurs ayant des géométries
aile et stab en simple trapèze. Ce
fichier est encore en cours de validation. Dans ce but j’aurais besoin d’avoir
les caractéristiques de planeurs très différents (envergures et profils différents,
stab en croix, stab en T, fuselage fin ou au contraire volumineux
, nez court ou long…etc). Merci donc à ceux
qui voudraient participer à cette validation de se mettre en contact avec
moi.
A suivre donc après validation de ce fichier……
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